Un avenir radieux, décrit en 1880

 » – Mais comment pouviez-vous supporter une organisation si défectueuse, dont les inconvénients sautaient aux yeux ?

C’était comme l’ensemble de notre organisation sociale: nous en connaissions les défauts aussi bien que vous, mais nous n’apercevions pas les remèdes. « 

C’est l’un des nombreux échanges de ce roman classé SF « Cent ans après ou l’an 2000 », construit principalement sous forme de dialogue. J’ai été impressionnée par l’actualité du propos, par l’anticipation de l’auteur et par la crédibilité d’un futur proche tellement plus souhaitable tel qu’il le détaille au fil des pages.

Vous pouvez imaginer un monde sans riches, sans pauvres, sans chômage, sans violence, sans armée militaire, sans prison, sans argent, sans religions ?

Si nous avons été capables du pire, nous, les humains, pourquoi ne serions-nous pas capables de construire le meilleur pour la vie de chacun ?

Une réplique (page 121) l’évoque clairement:  » Il est plus facile de faire les choses bien que mal. « 

Et pourquoi pas, après tout, nous ne l’avons pas encore essayé ce système.

Tout le monde est instruit, chacun parle la langue de son pays et la langue universelle. Chacun a un accès égal à la culture, aux études, aux biens nécessaires selon les envies personnelles.

La vérité, la bienveillance, le respect, les capacités et le rythme de chacun sont la norme. La voix et le désir de chacun ont la même valeur.

La seule armée existante est une armée industrielle. Rien n’est privé, tout est public, pour le profit de tous. Le président ne peut être élu qu’après l’âge de quarante-cinq ans, soit l’âge de la retraite. Il ne peut être élu qu’au mérite après avoir fait ses preuves dans toutes les tâches et être sorti du rang, élevé par des épreuves variées et difficiles.

Seul un membre de l’armée industrielle peut devenir président, ce qui est donc impossible à tous les membres de professions libérales dont les métiers sont à la charge de la vie de la collectivité. Celui qui voudra étudier la médecine devra démontrer ses compétences, ses prédispositions avant d’être autoriser à s’exercer sur un corps.

Il n’y a personne à corrompre. Les talents produits par ce changement de fonctionnement des mentalités et des pratiques sont très nombreux et en libre concurrence.

Il est amusant de voir des germes d’idées du dix-neuvième siècle devenues la norme au vingtième. Je trouve fascinant d’observer le temps qu’il faut, le nombre d’années et le nombre de cerveaux prolifiques qui véhiculent des idées avant que celles-ci ne deviennent réalité.

Cet auteur, Edward Bellamy était de santé fragile et n’a vécu que quarante-huit ans (comme Balzac !). Je suis impressionnée par la qualité des œuvres qu’ils nous ont laissé en si peu de temps et heureuse qu’elles nous soient accessibles.

Edward Bellamy a connu la gloire avec ce livre, qui n’était pas son premier roman.

Julian West, un jeune Bostonien aisé, né en 1857 et contemporain de l’auteur, se trouve mystérieusement projeté en l’an 2000, passant d’un monde d’injustices et de pauvreté noire à une société où règne l’harmonie, la justice et la prospérité. Sous l’aimable férule du Dr Leete, de sa femme et de sa fille Édith, il découvre ce nouveau monde, ne manquant pas de faire de tristes comparaisons avec son époque d’origine. Dans cette nouvelle société, le problème ouvrier a disparu quand la nation a rendu obligatoire le travail — réparti équitablement — de 21 à 45 ans, avec pour unique employeur l’État : ainsi est constituée « l’armée industrielle ». Chaque citoyen voit son temps de travail aménagé selon la pénibilité de sa tâche, librement choisie (excepté lors des premières années). – La bibliographie de l’auteur- Ses principales œuvres.

Ce succès l’a amené à faire de la politique pendant une dizaine d’années, avant d’écrire une suite « Egalité » dont je vous parle aussi, car j’ai tant aimé l’immersion dans cette projection, que celui-ci apporte le complément d’explications nécessaires à la compréhension des inconvénients destructeurs du capitalisme.

J’aime beaucoup la présentation de ce livre, sa qualité de papier et ses bas de pages originaux.

Auteur en 1888 de Dans cent ans ou l’an 2000 qui connut un succès mondial et de multiples éditions en France à partir de 1891, Edward Bellamy propose une suite de ce classique de l’anticipation utopique avec Égalité (Equality). De ce second roman, seule « La parabole du réservoir d’eau » a largement été diffusée dans la presse libertaire et socialiste. Mais bien d’autres aspects du texte sont importants : Bellamy place les femmes à égalité avec les hommes (éducation, mariage, vie professionnelle, revenus, vêtements…), se positionne comme auteur précurseur de l’économie distributive (revenus annuels non capitalisables, propriété d’usage…), questionne la défense de l’environnement, la protection des animaux, l’impact des activités humaines sur la Terre, ainsi que l’unité de l’humanité (chaque habitant parle sa langue maternelle et la langue universelle). Il ne néglige pas non plus les progrès techniques et l’on voit apparaître l’électroscope, les disques phonographiques, les voitures à moteur et les véhicules aériens… Il invente également — il écrit ces lignes en 1897 — une « carte de crédit » qui permet aux citoyens du XXe siècle de régler toutes leurs dépenses.
Pour la première fois, ce texte majeur de la littérature d’anticipation utopique est disponible en français.
Traduction de Paul Zimmermann, revue, complétée et modernisée par Philippe Éthuin.


La retraite à quarante-cinq ans. Le capital est public, au profit de tous !

Présenté sous forme de dialogues, comme le précédent en moins romancé; plus technique, il met en évidence les incohérences de notre système.

L’intérêt de ce livre, c’est la juxtaposition entre les causes et les conséquences d’un monde inhumain et esclavagiste (le nôtre) face aux compréhensions, avec une analyse à posteriori, à l’aide des livres d’histoire et du héros de cette époque, face à l’évidence du bénéfice d’un monde sain et bienveillant pour tous et toutes choses que ce dernier peut constater autour de lui.

Le bien public est le bien de tous; les bénéfices sont profitables au service de tous et de la beauté des édifices communs.

Jamais personne ne vit avec l’angoisse du lendemain (comment gagner sa vie, manger, dormir).

Les esprits n’ont pas été déformés par les mensonges, la corruption, l’incompétence, l’assurance néfaste des ignorants, la violence, etc.

Plus aucune guerre, ce fut le triomphe des forces morales. Car contre qui se battre alors que le système mourait par le haut ?

C’était la mort du Dieu argent, du vice, de la fausse gloire. Un nouvel ordre social.

Vous pouvez y voir une ressemblance avec notre actualité.

2 réflexions sur « Un avenir radieux, décrit en 1880 »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *